lundi 7 avril 2014

Témoin du suicide de son codétenu à la prison de Forest : la banalité du mal

J'ai reçu le témoignage de A.S, un ancien détenu à la prison de Forest. Mon témoin parle anglais. Il ne maîtrise pas le français. Il est sans-papiers. Il était enfermé dans la cellule numéro 829 du bâtiment C de la prison quand, la nuit du 3 juillet 2013, vers 3.45h du matin, son codétenu s'est pendu. A.S a crié, hurlé à l'aide jusqu'à ce que des agents sont venus voir par œilleton de la porte de sa cellule. Ne sachant pas si le détenu pendu était encore en vie ou non, ils sont repartis, laissant  A.S seul avec lui. « L'aide » n'est venu qu'à 6h du matin. Soit plus de deux heures plus tard. Mon témoin n'a pas reçu d'aide psychologique. Il a reçu du chocolat et du coca-cola et a été isolé des autres détenus, en lui disant qu'il devait dire : « I don't know » : tu ne parles à personne et tu dis que tu  ne sais rien. Affaire classée. Voici son témoignage pour que la lumière soit faite sur cette affaire. 

Luk Vervaet, Association des familles & ami(e)s des détenus.



« Je m'appelle A.S. J'ai 27 ans. J'ai été incarcéré à la prison de Forest en juin 2013. C'était la première fois de ma vie que j'étais en prison. J'étais au numéro 829,.dans une cellule à deux personnes. La nuit du 3 juillet 2013, vers 3.45 h du matin. j'ai constaté que mon codétenu s'est suicidé.  Peut-être cela s'est passé déjà plus tôt dans la nuit, je ne le sais pas. J'ai crié, crié : « Chef ! Chef ! » Ils sont venus, mais ils n'ont pas ouvert la porte. Ils n'ont ouvert la porte qu'à 6 heures du matin. Là, ils sont venus avec la police, un médecin et des responsables de la prison. Ils ont amené le corps. Je me sentais terriblement mal. Ils m'ont enfermé dans ma cellule ne voulant pas me laisser sortir. Ils m'ont donné du coca-cola et du chocolat en me disant : tu ne parles pas à la presse, tu dis que tu ne sais rien. J'étais seul pendant 9 jours. Je ne pouvais pas dormir, ni manger. Je devenais fou. La police est venue. J'ai donné ma déclaration, mais ils ne m'écoutent pas, ils me disaient : « It's ok now. ». Mais ce qui s'est passé, je ne peux pas l'oublier. Si je ne prends pas de médicaments je n'arrive pas à dormir. Ca a été un drame dans ma vie. »          

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