A La Manufacture, un homme qui a connu la prison dès l'âge de 17 ans et y est demeuré 20 ans durant, pour des faits très graves qu'il affronte, témoigne. Jean-Marc Mahy s'adresse à nous sans faux semblants. Impressionnant.
Il est là. Pantalon noir, haut genre survêtement. Il n'y a qu'un tabouret sur le plateau sombre. Aux murs latéraux, deux fois dix-huit grands portraits en noir et blanc. Des hommes, des femmes. Photos des visages parfois retraitées, retravaillées. Au fond, tandis qu'il s'adresse à nous, on verra quelques images vidéo. Jamais redondantes. Des sortes d'échappées ou de focalisation sur des moments particuliers d'enfermement.
Un tabouret. Rien d'autre. L'homme se saisit d'un rouleau de large scotch blanc et délimite les contours d'une cellule, nous indiquant les places des différents objets...les minimaux atroces des sanitaires, etc...Il ne s'attarde pas.
Il est debout. Dans le récit. Jean-Michel Van den Eeyden a écrit le texte d'après le récit de Jean-Marc Mahy et le met en scène.
C'est un travail remarquable. Terrible récit. A l'abandon, mal aimé, le jeune Jean-Marc s'est laissé entraîner. Il a tué un représentant de l'ordre dans l'exercice de ses fonctions. Un épouvantable accident. Mais on ne peut guère faire pire face à la justice. En toute sincérité, lorsque l'irréparable advient, il ne croit pas que c'est lui qui a pu faire ce geste...
Aujourd'hui, il le confesse, il pense à la fille de cet homme. Elle a aujourd'hui 26 ans...Il raconte. Il est au présent. Il mime toutes les brimades, les humiliations, ces humiliations à répétition qui sont le lot des quartiers de haute sécurité en général...Jean-Marc Mahy est belge, il a été jugé au Luxembourg, mais tous les systèmes pénitentiaires se ressemblent.
Ce qui est puissant dans ce témoignage, c'est que celui qui s'adresse à nous ne se défausse en rien. Il ne cèle rien. Il raconte. Et ce récit est essentiel pour que nous, spectateurs qui n'avont pas connu la prison, nous comprenions.
Il y a sans nul doute en Jean-Marc Mahy une force particulière. Une intelligence, une sensibilité. Il ne parle pas que des conditions terribles, il parle de la manière dont il s'en est sorti en grandissant en prison. Avec la radio, la première fut Eve Ruggieri. Un matin, avec ses belles histoires sur l'Histoire. Et puis Les Tréteaux de la Nuit de France Inter, le théâtre, et pui surtout Macha Béranger sur Europe 1. On entend la voix de Macha, trop tôt disparue.
Jean-Marc Mahy a passé plusieurs diplomes en prison. Oui, il est debout. Il témoigne. Et, aujourd'hui, il travaille à éduquer, réinsérer des jeunes et moins jeunes qui ont commis des actes délictueux, sont en prison, en sortent et doivent, eux aussi, se tenir debout...
Il s'agit bien de théâtre car Jean-Marc Mahy est l'interprète du jeune qu'il fut, de l'homme qui s'est construit et qui souvent a appelé sa maman...
Une grande leçon humaine, sociale, politique à méditer.
La Manufeacture, 20h45. Jusqu'au 28 juillet. Relâche le 18 juillet. Durée : 1h20 (04 90 85 12 71)..
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