mardi 30 octobre 2012

Permanence chaque mardi – Permanentie elke dinsdag


Permanence chaque mardi – Permanentie elke dinsdag
de 9 à 12 h et de 18 à 21 h – van 9 tot 12 u en van 18 tot 21 u
Local Egalité, Rue du Chevreuil 4, 1000 Bruxelles
(tout près de la Place du Jeu de Balle – vlakbij het Vossenplein)

Prisoners' Family & Friends Association -
Association de Familles & Ami(e)s de Détenus – Vereniging van Families & Vrienden van Gedetineerden.

Facebook : http://www.facebook.com/groups/440384405982284/
Contact : Luk Vervaet 0478653378


mercredi 24 octobre 2012

Le Journal de Souad : Mon arme, l'écriture


photo Marcel Mussen

Comme d'habitude, je prends de quoi écrire, il faut que je me soulage.
Ce nœud à la gorge m'étouffe ; espérer, encore espérer, mais espérer quoi ?
Et jusqu'à quand ?
Depuis trop d'années, je refuse le passé, mais le futur me semble chargé des mêmes déceptions.

Ce matin, c'est différent.
Je n'ai jamais voulu perdre espoir, mais là je ne peux plus me mentir.
Je n'attends plus rien. Je ne veux pas de compréhension, je ne veux pas de pitié.
Mon cri de détresse, je ne veux pas qu'il soit entendu, non, je ne le veux plus car
Il est sourd de communication, sombre car étouffé par la lueur, il est libre de privation.
Toi qui m'entends,
Toi qui sais et qui vois, dis-moi : qu'ai-je donc fais pour mériter cela ?
Depuis toute petite, je suis blessée, mal d'être ce que je suis, et pourtant je ne peux me défaire des miens.

Le Journal de Souad : Saison dans nos vies


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photo Marcel Mussen

C´était une toute autre saison : le soleil brillait, l'éclat s'en ressentait, une chaleur intense qui vous permettait d'espérer que plus jamais il ne fera froid, comme pour rendre l'hiver inerte ou inexistant.
Irréel de penser à la neige, au froid, car il faisait trop beau, même dans mon cœur.
Le bonheur tout simple : partager un moment semblant indescriptible.
C'était une autre saison, si lointaine, inexistante à présent.
Ce soir, il neige dans la rue, les toits, les maisons, tout est blanc , mon cœur est nostalgique, mais heureux de t'avoir rencontré.
19 novembre 1991

samedi 20 octobre 2012

Le Journal de Souad : Lettre à un juge

photo Marcel Mussen


Votre honneur
Je me permets, par la présente, de vous écrire ces quelques lignes afin d'intercéder en faveur de mon frère.
Mon objectif n'est pas de le disculper mais de vous demander de vous pencher avec humanité sur son cas.
Je ne sais plus le nombre de condamnations qu'il a eues ; je pense qu'il serait temps de réaliser - sans vous heurter, votre honneur - qu'aucune solution n'est ressortie de ces nombreuses années d’incarcération.
Le recondamner, c'est postposer un nouveau démarrage,
Sauf qu'à sa prochaine libération, il aura perdu quelques années de vie, il aura nourri encore plus de sentiments négatifs.
Sauf, votre honneur, que la prochaine séquence de liberté sera encore plus difficile pour la réinsertion.
Je souhaite que vous vous penchiez à nouveau sur ce que Justice veux dire, sur ce que Justice doit apporter.
Punir quand il faut soigner ? Enfermer plus longtemps quand on est récidiviste, et pour les mêmes faits ?
Peut-être que, pour vous, ce ne sont déjà plus des humains ? Peut-être que, pour le système judiciaire, c' est trop onéreux de réfléchir à de vraies solutions ?
Cependant, pour nous, ce sont des fragments de nos chairs, ce sont nos frères, ce sont des êtres qui nous sont chers.
Peut-être que la différence se situe là.

Le Journal de Souad : Mon père


photo Marcel Mussen
 
Immigré des années 60,
Une valise à la main, sillonnant le quartier du Midi, dans un pays qui deviendra le nôtre.
Tu es venu avec une valise.
Une valise qui résume à chaque fois nos fins d'histoire ; celle de nos unions, celle de nos divorces.
Combien de fois tu es parti, même sans valise ?

J'ai l'impression de ne pas t'avoir connu.
Alors, pourquoi je souffre de ton absence ?
Alors, pourquoi je t'aime ?
Alors, pourquoi je continue à te chercher ?
Pourquoi on n'a pas pu avoir de père ?
Tu as immigré pour nous offrir une vie meilleure, ce fut sans doute ta seule intention,
Mais que de mauvais choix cela a engendré.

samedi 13 octobre 2012

Le Journal de Souad : Prison


Photo Marcel Mussen


Assis dans un espace étroit, des murs à ne plus en finir.
Des règles, des devoirs, des habitudes.
L'humain enfermé pour diverses raisons, mais au même endroit,
Ce n'est pas juste : je dirai toujours que les toxicomanes n'ont rien à faire en prison.
Pourquoi, occulte-t-on ce problème majeur ?
A l'heure où la technologie est mise en avant, on exclut l'être humain.
Le système carcéral ne pense plus solutions,
Les maillons faibles sont relégués au dernier plan, et le plan c'est la prison.
Qu'est-ce qui fait que le taux de récidive est si élevé ?
Pourquoi ne réintègre-t-on pas Luk Vervaet ?
Pourquoi des détenus comme Nordine Benallal sont-ils dans un isolement inhumain, alors que fleurissent toutes sortes d'associations en ce sens et pour ce combat ?
Est-ce un leurre, une forme d'exemple comme pour Ali Aarrass ?
On sait pertinemment que ce sont des délinquants de première zone, qui se sont empêtrés dans un système boule de neige.
Concernant Ali Aarrass jamais, personne ne dévoile des preuves tangibles ; quels sont les faits qu'on lui reproche ? Toujours rien.
Des familles comme la mienne qui ont été victimes du fléau ravageur qu'est la drogue, et à qui la justice a collé un étiquette de dealers.
Tous rangés à l'étroit pour être encore plus exposés à la folie, car je n'ose imaginer tout ce que les prisons ont abrité, non je n'ose l'imaginer.

Le Journal de Souad : A mes parents


Photo Marcel Mussen

A ma mère, à mon père


Tu as pu nous offrir la chance, en te sacrifiant,
Tu as donné sans regarder,
Tu as partagé sans compter; je te demande pardon,
Je suis et demeure ta fille ; ta douceur n'a jamais été dans les gestes,
Ton amour n'a jamais été en paroles,
Tu es la mère la plus forte que je connaisse,
J'ai longtemps puisé la force en te regardant,
Petite, je t'attendais des heures à la fenêtre.

Mon père à l'étranger, il devint vraiment un étranger que l'on aime, qui nous manque, mais qui est absent de tout notre univers ;
Oui, perdre son père sans comprendre ce qui se passe exactement ;
Univers de questions, pas d'au-revoir ;
Des bribes de souvenirs, d' images,
Je me suis accrochée à toi mais avec trop de pudeur au point que je n'arrive pas à t'entourer de mes bras,
J'ai perdu mon père sans avoir le courage de le prendre dans mes bras, je suis rentrée plusieurs fois dans sa chambre pour l'enlacer et lui dire :
Je t'aime Papa, tu manques à ma vie, mais j'ai pas su ;
Je savais qu'il était condamné : tout au plus 4 mois m'avait précisé le spécialiste.
Je devais rentrer à Bruxelles et reprendre un billet pour les semaines à venir.

J'étais avec ma grande sœur, nous quittions le Maroc ; j'avais deux enfants, un petit de 4 ans et une petite de 2 mois environs.
C'était le 4 mai, je n'oublierai jamais.

J'avais un sentiment de fin, je ne reverrai jamais mon père.
Pourtant, dès mon retour, j'ai pris des billets d'avion pour le 8 juin ; ce voyage tombera à l'eau : un autre drame m'attend quelques jours avant.

JE T'AIME PAPA D'AUSSI LOIN QUE TU PUISSES ÊTRE,
JE T'AIME MAMAN POUR TOUT CE QUE TU AS SU TENIR ET MÊME RETENIR.

Le Journal de Souad : Répétition



J'ai mal, toute cette douleur me consume, jaillit en colère.
Je ne sais plus, le rire je ne le sens pas, ma douleur m’assiège,
Mon texte c'est moi, incompréhensible destin.
Qu'on ne me juge pas, personne ne vit à ma place.
Ne mesurez pas ma foi, n'essayez pas de déterminer le pourquoi du comment.
Je hurle étouffée par la discrétion, endormir la douleur, j'y croyais encore mais j’échoue sur des rives trop connues,
La prison encore, de là où je ne l'attendais pas, annoncer à mes enfants l’incarcération de leur père...
J'entends les jugements, non mon ex mari, n'était pas dans la délinquance...
Quand je me suis mariée,
Je n' ai plus l'envie de lutter, je vais avec la vague, avec le choc.

Le journal de Souad : Lassitude


photo Marcel Mussen


Je suis lasse, perdue, le regard hagard, je me fais défaut,
Je vais avec la vague, je ne lutte pas, haut le cœur,
Je veux me blottir contre moi, comme, je peux, je me dois de me tenir, pour me contenir,
Faire tomber les masques de ceux qui ne vous aiment pas, c'est dur,
Parfois, je ne sais plus si tout est lié, si tout est faiblesse, ou simplement si le gouffre est le plus fort,
Seulement , je suis croyante et je te supplie seigneur de ne pas m'abandonner comme je l'ai fait,
Je te supplie seigneur d'apaiser ma conscience et de me pardonner toute forme de faiblesse.
Les responsabilités me croulent dessus, je n'arrive pas à me défaire.