photo prison de Fresnes
Une Mise au point d'Adlène Hicheur
28 Février 2012
Par
jplees74
Je publie intégralement ci-dessous cette mise au point d'Adlène
hicheur au sujet des informations parues récemment dans la presse à son
sujet. Rappelons que pour avoir échangé sur des forums internets
qualifiés "d'islamistes" par les fonctionnaires de la DCRI, M.Hicheur,
chercheur en physique des particules et enseignant à l'EPFL de Lausanne,
est maintenu depuis deux ans et demi en détention provisoire à la
maison d'arrêt de Fresnes, et sera jugé les 29 et 30 Mars à Paris.
Fresnes, le 15 février 2012
Je me sens obligé de sortir de ma
réserve pour dénoncer l’exposition hystérique de ma personne, et la
pression qui s’en suit sur mes proches, après avoir déjà subi une
campagne acharnée de destruction parallèle à une incarcération injuste
basée sur un dossier traficoté de toutes parts et qui sera débattu en
temps voulu.
Il s’agit aussi de marquer le coup
face aux prétentions de certains organes d’information à vouloir
défricher de manière simpliste une intrigue riche en subterfuges. Ces
tentatives d’explication avant l’heure, qu’elles soient de bonne ou de
mauvaise foi, sont de toute façon au minimum maladroites, préjudiciables
à mes intérêts et faussent complètement l’image de la réalité.
Ainsi, je dénonce le saupoudrage
d’éléments non débattus, présentés comme des vérités établies, et la
tentation générale de faire un procès dans la rue, sur la seule base de
la matière accusatoire. Cette situation m’est d’autant plus pénible que
je suis éprouvé par une détention très longue, effectuée dans des
conditions difficiles, et que je suis dans l’incapacité de préparer
convenablement ma défense, une énième demande de mise en liberté ayant été rejeté récemment.
Je dénonce plus particulièrement
certains quotidiens français à grand tirage, qui n’hésitent pas à se
faire porte-voix, exégètes et pédagogues de la mouture de l’accusation,
faisant montre d’une volonté manifeste de me nuire, d’atteindre à ma
dignité, voire même de préparer l’opinion au couronnement d’une
injustice en cours depuis bientôt 28 mois.
Deux ans après la campagne de
lynchage de la fin 2009, le bal est ré-ouvert depuis quelques semaines
comme par exemple dans le quotidien Libération (un article du 10 janvier 2012),
dont je n’ai pu prendre connaissance que ces dernier jours. En effet
(dans cet article et dans d’autres plus récents, me dit-on), la
présentation de l’intrigue suit exactement le script de l’accusation
relatant des éléments à prendre avec de grosses pincettes. Si je ne
conteste pas aux journalistes le devoir de présenter les deux versions
de l’affaire me concernant, je proteste contre des procédés et autres
expressions me décrivant de manière assez tendancieuse.
Ainsi, faute de
vouloir aborder la question (principale !) du vide pénal d’une affaire
instrumentalisée, on joue sur la représentation symbolique, la
psychologie, voire la para-psychologie, pour s’en prendre à ma personne
sous différents angles, non sans maintes contradictions. Je découvre
ainsi que je serais « Musulman pratiquant … mais avec des flottements
dans la foi», phrase recomposée à des fins évidentes et que je n’ai
jamais prononcée telle qu’elle est écrite. A contrario, je suis accablé
d’un certain nombre de « ismes » et de « istes » disponibles dans le
magasin de l’action psychologique. Le dénigrement se parachève par la
mention de certains passages supposés de dépositions qui, pris
isolément, ne veulent rien dire et qui ne sont utilisés que pour
construire un état d’esprit, des traits de « personnalité ».
Viennent ensuite les fameux
passages incriminés, extirpés de leur contexte, très approximativement
traduits de l’arabe, et montés en épingle comme étant le cœur de
l’accusation, qui justifierait tout ce festival et le fait d’enterrer
vivante une personne pendant des années, compromettant ainsi même l’idée
de procès équitable.
Enfin, puisqu’il faut toujours
avoir plusieurs flèches dans le même carquois, il est fait mention de
reproches relatifs à une prétendue contribution à un organe médiatique
d’une organisation armée. Or, il faudrait prendre le temps de vérifier
la crédibilité des énormités et confusions entretenues dans le scénario
accusatoire, éléments qui seront dévoilés en un temps et un lieu
appropriés.
Aucune précaution n’est prise,
aucune remise en cause des contradictions, des excès et des incohérences
n’est faite. La connivence journalistique est quasi-totale. Le fait de
laisser moisir quelqu’un pendant plus de deux ans sans jugement sur la
base d’éléments aussi insignifiants et retravaillés ne semble pas
choquer certaines plumes. Quel spectacle lamentable offert sans pudeur !
Il n’est bien sur pas question ici
de développer les réfutations de la défense qui mettront en lumière des
pratiques détestables et iniques. Il est surtout question d’exprimer un
raz le bol car il est à craindre que d’autres adeptes du lynchage et de
la chasse aux sorcières emboitent le pas.
Dans tous les cas, on peut espérer
que les gens se posent la question sur les raisons profondes pour
lesquelles on en arrive à un tel engrenage frénétique qui démontre
‘absence d’un sens minimal de raison, de lucidité, et de responsabilité
chez des personnes qui utilisent les moyens de l’état et un pouvoir
discrétionnaire quasi illimité pour servir des intérêts qui sont avant
tout particuliers
Adlène Hicheur, Maison d’arrêt de Fresnes, 15 février 2012
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