samedi 23 juin 2012

Le journal de Souad : C'est un jeudi que ma vie s'en est allée à la dérive



Il fait soleil, je viens de rentrer avec mes enfants après une détente au parc pendant 3h
à peu près.
Ce matin-là je suis allée à mon cours, j'y vais deux fois par semaine, mon emploi du temps est chargé.
Nous sommes en mars et la saison est belle, je me sens bien, j'aime le retour du soleil, sa lueur m'inspire toujours la joie même si j'aime l'hiver, ce froid qui vous invalide, vous bafoue, parfois vous secoue.
Cependant, l'hiver est pour moi lié à la nostalgie, il est mystérieux et me fait souffrir dans mes entrailles.
Je garde sans doute des séquelles liées à l'enfance.
J'avais préparé le souper avant d'aller au parc ; une fois rentrés, nous nous débarbouillons, les enfants et moi. Lui ne rentre jamais avant 21h.
Le téléphone sonne, mon interlocutrice me signifie sa venue ; elle est accompagnée d'une tierce personne et elle veut absolument venir.
Je suis un peu surprise car elle insiste pour que ce soit tout de suite. Je me perds en explications - souper, dodo des enfants, etc - mais cela semble important.
Elle fait en sorte que les enfants soient isolés et me prend à part : « Je dois te parler, sois courageuse » me dit-elle. Je la regarde, elle tremble, elle pleure et pendant ce laps de temps aussi rapide que l'éclair, trente-six mille drames se bousculent dans ma tête. Le plus douloureux : peut-être la mort d'un des miens.
Il s'agissait d'un deuil à coup sûr. 
Que s'était-il passé ?
Je me revois debout, et elle me dit enfin : « Ton mari a une double vie, un enfant, un autre appart près de votre commerce ».
Les mots écorchaient sa voix avant que l'impact ne se loge sur moi ou en moi.
J'étais scindée âme et corps, cœur et raison.
Elle ajoute : « Tu fais ce que tu veux mais tu dois savoir ».
Je lui dis : « Ça va, t’inquiète pas, arrête, calme toi ».
Elle est désolée de me l'annoncer mais elle n'avait plus le choix. Elle formule le pardon à la place du responsable et ça je ne supporte pas.
« Ok », lui dis-je, « Depuis quand ? C'est qui ? L'enfant a quel age ? »
Je suis abasourdie. Impossible de décrire cela avec exactitude. La souffrance laisse d'abord la place à la colère.
Quand elle vient, c'est avec plus de malice, la souffrance entre comme une sangsue, elle est entrée et, jour après jour, elle a grandi avec ma douleur aussi bien physique que psychique. Au bout de quelques jours, j'étais terrassée, vidée, sans forces, je prenais des cachets pour pouvoir manger.
C'est un jeudi que ma vie s'en est allée à la dérive, mais puisque j'étais sous l'emprise de la colère, j'ai pu, dès le lundi matin, prendre rendez-vous chez une avocate pour lancer la procédure de divorce.
Lui, pas question de le revoir : devant toutes les preuves, il ne trouva pas de défense sur le coup à part que tout avait été trop vite, qu'il ne voulait pas me quitter et tout le baratin de quelqu'un qui est pris la main dans le sac. Nous ne nous sommes plus revus ; je lui avait interdit de passer la porte d'entrée. Il venait prendre les enfants devant.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire