mercredi 21 décembre 2011

Rekenhof : ‘Politiek voerde slecht gevangenisbeleid'

http://www.standaard.be/artikel/detail.aspx?artikelid=P93JSI5L&word=gevangenisbeleid

JUSTITIE

  • DS woensdag 21 december 2011, 03u00
  • Auteur: (vhn)
  • BRUSSEL - Het Rekenhof is in een doorlichting niet mals voor het Belgische gevangenisbeleid.
De maatregelen die de regeringen van de afgelopen vijftien jaar namen om de overbevolking in de gevangenissen tegen te gaan, misten deels hun doel. Tot die conclusie komt het Rekenhof in een audit van het gevangeniswezen. De krant La Libre Belgique kon een voorontwerp van die audit inkijken.

Volgens die audit wordt het effect van maatregelen (zoals al dan niet voorwaardelijke vervroegde invrijheidsstelling, elektronisch toezicht en werkstraffen) te weinig opgevolgd, verandert het doel te vaak en beogen ze te vaak een kortetermijneffect. ‘Ondanks al die inspanningen neemt de overpopulatie niet af', vindt het Rekenhof. ‘Politici gaan ook te weinig na wat de gevolgen zijn van hun beleid.'

Zelfs als het ‘Masterplan Gevangenissen', dat de capaciteit danig moet verhogen, vandaag zou zijn afgerond, waren er nog 900 plaatsen te weinig. Het Rekenhof voorspelt tegen eind volgend jaar een tekort van 2.414 plaatsen.


Les prisons débordent et le phénomène va s’amplifiant
J.-C.M.
Mis en ligne le 20/12/2011
La situation ne cesse de se dégrader dans une Belgique qui, de surcroît, fait office de mauvais élève européen.
Le constat dressé par la Cour des comptes s’agissant de la surpopulation carcérale est sans concessions. La Belgique file du mauvais coton et sans une politique cohérente, une vision claire des choses, une législation adaptée, des données chiffrées fiables, toutes choses qui n’existent pas, ou alors de façon embryonnaire, on doit s’attendre à pire encore dans les années à venir.
Quelques chiffres en disent plus long que de savantes analyses. En voici quelques-uns. En 2008, la capacité moyenne des prisons belges était de 8 384 places; en 2009, elle est passée à 8 404 et en 2010 à 8 949. Dans le même temps, la population journalière moyenne des détenus (qui est déterminée par les entrées, les sorties de prison et la durée de la détention) fut respectivement de 9 890, 10 237 et 10 535 personnes. Cela donne des taux de surpopulation de 18 %, 21,8 % et 17,7 %.
Entre 2000 et 2010, relève la Cour des comptes, le taux de surpopulation a oscillé entre 16,4 % et 18,9 %, et si l’on a assisté à une légère diminution en 2010, c’est essentiellement en raison de l’ouverture de places à la prison néerlandaise de Tilburg.
Autre constat édifiant : en 2010, la part des condamnés dans la population carcérale était de 53 % pour 35 % de détenus en détention préventive et 10 % d’internés. L’augmentation de ces trois catégories est considérable depuis 1990, indique le prérapport de la Cour des comptes. On relève plus 109 % d’internés, plus 90 % de condamnés et plus 69 % d’inculpés en préventive. A titre anecdotique, le pourcentage des autres catégories de détenus a baissé ces vingt dernières années parce que le vagabondage n’est plus poursuivi et parce que les mineurs d’âge et les illégaux sont désormais accueillis dans des centres spécialisés.
Entre 1991 et 2009, on relève aussi que le nombre de condamnations à des peines supérieures à cinq ans est passé de 39 % à 65 %.
La diminution de la part des courtes peines doit, dit la Cour, être attribuée à la non-exécution des condamnations à des sanctions de courte durée, à l’assouplissement des conditions de libération anticipée et à l’adoption d’un certain nombre de peines alternatives.
Quoi qu’il en soit, le rapport observe qu’il existe d’importantes différences entre les établissements pénitentiaires, qui ne sont pas tous confrontés avec la même acuité au phénomène de surpopulation. Les prisons qui accueillent des condamnés ou des internés sont moins soumises à la pression que celles qui abritent des détenus préventifs.
Lorsqu’on s’intéresse aux comparaisons avec l’étranger, les chiffres, qui doivent être analysés avec prudence car tous les pays n’appliquent pas les mêmes critères de "comptage", ne plaident guère en faveur de la Belgique.
Si le nombre de détenus par 100 000 habitants n’est pas spécialement plus élevé qu’ailleurs, on constate qu’au 1er mars 2009, la moyenne européenne quant aux taux d’occupation des prisons était de 98,4 % alors qu’on enregistrait en Belgique plus de 128 détenus pour 100 places. Le nombre de détenus condamnés à de lourdes peines est également proportionnellement plus élevé dans notre pays.
Enfin, les perspectives ne sont guère réjouissantes. Si l’on inclut la capacité de la prison de Tilburg, on peut estimer que le nombre de places passera de 9 176 en 2010 à 9 575 en 2011 et en 2012. Dans le même temps, le nombre estimé de détenus passera de 10 600 à 11 111 puis 11 646, indique le rapport. Soit une augmentation de la population journalière moyenne de 500 détenus chaque année. S’il est fait abstraction de Tilburg, cette augmentation est estimée à 300 en 2011 et à 500 l’année suivante. Enfin, si, en 2012, les juges de l’application des peines sont rendus compétents pour traiter des peines inférieures ou égales à trois ans, on pourrait assister à une surpopulation carcérale supérieure de 3 100 unités par rapport à 2011.
Un audit très critique sur la surpopulation carcérale
Annick Hovine
Mis en ligne le 20/12/2011
La Cour des comptes a examiné les mesures prises depuis quinze ans. Son rapport est très sévère à l’égard d’une politique pénitentiaire erratique.
Les prisons sont au bord de l’explosion. Avec environ 11 500 détenus, pour 9 571 places, difficile de développer, dans les établissements pénitentiaires, des activités visant, à terme, à réinsérer les détenus dans la société. La surpopulation carcérale empoisonne l’action de la justice, avec pour effet de paralyser toute velléité de réforme en milieu carcéral. Pour la première fois, le problème a attiré l’attention de la Cour des comptes, qui a pris l’initiative de réaliser un audit sur la surpopulation dans les prisons (lire ci-dessous).
Et, à en lire l’avant-projet du rapport, la situation ne risque guère de s’arranger dans les années à venir. Selon des estimations, fin 2011, il devrait manquer 1 929 places dans les établissements pénitentiaires belges; un chiffre qui grimperait à... 2 414 en 2012.
Le problème de surpopulation carcérale est particulièrement aigu en Belgique, où on affiche un détestable score de 128,4 détenus pour 100 places, contre 98,4 % en moyenne dans les prisons européennes.
Pourquoi cette situation déplorable qui perdure depuis plus d’une décennie ? La Cour des comptes s’est livrée à un examen minutieux des mesures prises au cours des quinze dernières années (libération conditionnelle, surveillance électronique, peines de travail autonomes, mise en liberté provisoire...) pour tenter d’endiguer le phénomène.
En filigrane du volumineux rapport transparaît une critique en règle de la politique pénitentiaire menée par les gouvernements successifs. Entre les lignes, on comprend que les mesures censées lutter contre la surpopulation sont rarement chiffrées; qu’elles changent souvent d’objectif en cours de route et ne font l’objet d’aucune évaluation; qu’elles jouent sur un effet d’annonce et se basent sur des considérations à court terme (d’ailleurs pas toujours dénuées de populisme)...
Premier constat : malgré tous les dispositifs ajoutés, la surpopulation ne diminue pas structurellement. Seule la libération anticipée (avant la fin de la peine, avec ou sans conditions) a produit des effets positifs, en permettant de faire baisser le nombre de détenus. La Cour des comptes tempère quelque peu : il est possible que sans les peines de travail autonomes, la surveillance électronique ou la liberté sous conditions, les prisons soient encore davantage surpeuplées, "mais on ne dispose pas d’informations à ce propos" .
S’agissant du Masterplan (qui prévoit la construction de nouvelles prisons), que le précédent ministre de la Justice, Stefaan De Clerck (CD&V), brandissait fièrement comme solution, la Cour des comptes a calculé que si les nouveaux établissements pénitentiaires ouvraient leurs portes demain, et en tablant sur une stabilisation de la population carcérale, il manquerait encore 900 places...
En outre, il n’existe aucun aperçu actualisé de l’avancée du Masterplan, dont la Cour des comptes n’a pas pu, avec les informations disponibles, calculer l’impact budgétaire total.
Au niveau de l’élaboration de la politique de lutte contre la surpopulation, la Cour des comptes pointe surtout le manque d’évaluations "ex ante" ou d’analyse de l’impact éventuel de ces mesures : effets concrets, potentiels effets pervers, conditions pratiques préalables à leur mise en œuvre...
Il n’existe d’ailleurs aucune enquête scientifique récente sur la surpopulation et l’impact des mesures prises (notamment sur la récidive), souligne le rapport. Une telle enquête est rendue plus compliquée encore par l’incompatibilité des banques de données des différents acteurs (greffes, établissements pénitentiaires...). Difficile, dans ce contexte, d’évaluer de manière objective et réaliste les effets qu’on pourrait attendre de ces mesures sur la surpopulation carcérale.
La Cour des comptes souligne aussi cruellement que, pour certaines mesures, on pouvait savoir "à l’avance" l’impact limité sur la surpopulation carcérale. Exemple ? "Le nombre d’étrangers condamnés qui peuvent être concernés par un transfert (vers leur pays d’origine, NdlR) est très limité." Ou : "La plupart des condamnés qui écopent d’une peine de travail n’auraient jamais atterri en prison si cette mesure n’avait pas existé." Mais encore : "La plupart des surveillances électroniques sont accordées après une interruption de peine, ce qui a sans doute un effet très minime sur la surpopulation."
Gros point noir de la politique pénitentiaire, selon la Cour des comptes : il n’existe aucune définition légale de la notion de capacité (nombre de places) des prisons et aucun critère standardisé pour la calculer. Les intentions politiques sont rarement traduites en objectifs mesurables et la récente intention de s’engager vers une extension de capacité des prisons n’a pas été motivée, indique encore la Cour des comptes. Pour qui il manque, dans la lutte contre la surpopulation, une vision politique-coupole, qui intègre des objectifs et des instruments pour y parvenir dans une perspective pluriannuelle.
La lutte contre la surpopulation carcérale est complexe, reconnaît la Cour des comptes : quand plusieurs acteurs sont concernés, il manque souvent une coordination, un feedback et une concertation organisée. "C’est surtout la concertation avec la magistrature assise qui semble difficile", lit-on dans le rapport.
La Cour des comptes identifie un autre problème criant : plusieurs points de la loi Dupont (réglant l’administration des établissements pénitentiaires et le statut juridique des détenus) ne sont pas encore en vigueur, ce qui oblige l’administration pénitentiaire à travailler sur base de circulaires pour la surveillance électronique ou la mise en liberté provisoire. "Le pouvoir exécutif intervient ainsi dans des jugements du pouvoir judiciaire, ce qui porte atteinte à la séparation des pouvoirs et est donc en principe anticonstitutionnel."

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